Du temps. Oui, ce soir à travers ce nouveau billet "Derrière les portes et les façades" il sera question de temps...mais d'un autre temps que le temps parisien qui va toujours trop et plus vite...cette ébullition des minutes qui s'échappent dans notre quotidien et qui nous empêche tout simplement de prendre le temps de regarder ce qui est juste sous nos yeux. Ce temps qui poursuit toujours sa course, sans que rien ne puisse l'arrêter, bien au contraire alors même que nous voudrions gagner du temps pour profiter davantage de la vie, nos rythmes effrénés ne font que le pousser un peu plus vers l'avant...
Réaumur (2ème arrdt) comme l'indique imperturbablement le gros cadran juché en haut de cet immeuble Art Nouveau....le temps s'est arrêté, et pourtant tout sur cette façade indique le temps qui passe.....
évocation des douze mois de l'année inscrits en tête de chaque chiffre du cadran et enfin les douze signes du zodiaque en bas reliefs, au niveau des 2ème et 3ème étages. Quelques détails de mosaïque viennent encore achever cet étrange assemblage par quelques notes dorées...Et pour ma part, je prendrai le temps d'attendre Désiré....qui lui aussi prend tout son temps....
C'est en redescendant la rue Blanche (9ème ardt) que j'ai croisé un personnage qui reste une figure bien emblématique de la ville de Paris, même si cette personne est morte il y a quelques 126 ans...En effet, au n°78 de la rue qui relie le quartier de Pigalle à la très chaste place d'Estienne d'Orves, se dresse une vieille bâtisse, au style très particulier, au cachet presque médiéval, avec ses fenêtres à croisillons et sa pierre d'une douce couleur sable sous les rayons du soleil matinal, décorée de quelques discrètes sculptures. Il s'agit en fait à ce niveau de la rue, de l'ancienne maison de Théodore Ballu, grand architecte parisien du XIXème siècle, qui laisse à la capitale plus d'un édifice remarquable.
un détail m'a donné envie de mener une petite enquête qu'à ce jour je n'ai pas totalement pu faire aboutir. Au dessus de la porte a été sculpté, en signe d'hommage, et de souvenir, un compas, un pendule et une équerre. Des outils bien utiles à un architecte me direz vous, certes.....mais ces deux éléments m'ont également rappelé les symboles d'une confrérie, celle de la franc maçonnerie.
existe bien pour les francs-maçons, il n'est certainement pas question du Dieu de l'Eglise et encore moins de notion de la Sainte Trinité...même si le chiffre 3 est un chiffre clé pour la grande Loge.
fait preuve d'une belle dextérité. Il a en effet ici écrit une page architecturale dans un pur gothique flamboyant fidèle à l'original dans un bel usage de la pierre. Dans un tout autre style, il se donne également à la reconstruction de l'Hôtel de ville incendié durant le Commune.
Dans le coeur du 3ème arrondissement en allant sur l'ancien site des Halles reconverties depuis quelques

Bourgeois parisien du XIVème siècle, Flamel est écrivain public, copiste et libraire juré. Son sens de l'investissement immobilier, et son mariage avec sa femme Pernelle, (deux fois veuve possédant de grand bien, épousée vers 1370), lui permit de jouir d'une fortune confortable, qu'il mit au service du développement urbain parisien, mais aussi au développement des activités des libraires copistes, et enfin et surtout au service des plus pauvres. Notamment à travers
la matière détenus par des fortunes bourgeoise du Moyen-Age. Dans le même temps, apparaît l'idée qu'un sens alchimique est caché dans les figures allégoriques
Au coeur de Pigalle, dans ce 18ème arrondissement où fleurent (bon) les odeurs en tout genre, entre les sex shop, peep show et autres bars à hôtesses se cache un lieu un peu secret... L'endroit qui fait l'objet de ce billet dénote totalement du cadre dans lequel il est situé : au n°58 du boulevard de Clichy, entre un cinéma X et une échoppe de souvenirs pour touristes en quête de pittoresque et qui, invariablement, visiteront le quartier à bord du "petit train" montmartrois se dresse une demeure qui aurait pu être le cadre d'un roman de Proust ou d'Alexandre Dumas. Je souhaitais en effet m'arrêter ce soir sur cette façade qui m'a récemment interpellée, de par son individualité dans ce quartier parisien et qui, à sa façon, relate une page de l’histoire de Paris, celle de la Commune de Paris, dont on fête cette année le 140ème anniversaire ce printemps.
illuminant la façade que l’on devine au loin....On distingue à peine les sculptures et les décors qui ont fait de cette adresse une lieu de vie agréable et de plaisirs. Le superbe escalier en spirale à double volutes évoque à lui seul le train de vie des anciens propriétaires et les deux statues porte flambeaux ont probablement accueillis bon nombre d'invités lors de dîners et fêtes prestigieux... Mais cette adresse n'est pas qu'un endroit reflétant grande vie et prospérité : après le porche sombre où la fraîcheur transpire en plein été, dans la cour, se trouvent trois bas reliefs de bois sculpté évoquant les
Les soldats de ligne grimpent aux buttes par les pentes qui y conduisent Rue Lepic, la résistance est très vive à la barricade qui défend la place Blanche. Un groupe de femmes, animé par Elisabeth Dmitrieff et Nathalie Le Mel, se joint aux fédérés. Après avoir subi de nombreuses pertes, les combattants se replient sur la place Pigalle.Après la prise de Montmartre, on tua partout : "Autant de rues comptait la butte, autant on peut compter de tueries", dira Camille Pelletan, dans La Semaine sanglante : tuerie rue des Abbesses, au coin de la rue Germain-Pilon, tuerie rue Lepic, au coin de la rue Tholozé ; le long de la maison portant le numéro 48, vingt corps restent alignés sur le trottoir, tuerie place de la Mairie. Les fédérés qui se trouvaient là sont percés à coups de baïonnette, tuerie rue des Poissonniers, tuerie au Moulin de la Galette. Les Gardes nationaux y sont surpris, cernés, désarmés. On en exécute quelques-uns sur place ; les autres sont emmenés au sommet de la butte, versant nord, sur l’emplacement d’une batterie destinée, pendant le siège, à combattre les batteries prussiennes de Stains, et y sont fusillés, tuerie au Château Rouge. On portait les cadavres dans la cour d’une école voisine où l’on avait installé une morgue, tuerie dans un petit enclos, rue des Carrières (rue Eugène-Carrière). On avait pris dans la même rue treize des défenseurs de la barricade, dont deux blessés. On les fusilla tous".
Plusieurs de ces massacres ont eu lieu dans le quadrilatère formé par le boulevard de Clichy, la rue Lepic, la rue des Abbesses et la rue Germain-Pilon. Le centre en était la Villa des Platanes. Il n’y a donc pas lieu de s’étonner qu’un artiste inconnu, peut-être témoin oculaire de la barbarie versaillaise, ait voulu laisser une trace de ces tragiques événements (source : L'actualité de la Commune).
Ainsi, outre le fait d'évoquer une vie protégée, sûre et lumineuse d'un bonheur sans ombre, ce lieu se fait aussi le messager et le dépositaire d'une histoire qui est tout simplement la nôtre. Mais comme l'accès de cette cour est strictement privé, je n'ai pu me contenter de la photograhier que depuis la grille de l'entrée... Ce qui n'est preque pas un mal, ainsi la Villa des platanes garde ses secrets....
Sous les marronniers en fleurs et généreux d'une ombre rafraîchissante, se trouvent quelques bancs et une fontaine Wallace dont le vert caractéristique s'harmonise aux feuillages, tendis que le bruit de l'eau qui coule entre les cariatides fait écho aux bruissements des feuilles...
lettres (comme Max Jacob ou Guillaume Apollinaire), une pépinière (pour ne pas employer le terme de "ruche" qui fera l'objet d'un prochain billet...) qui a participé au nouveau souffle de l'art pictural à la fin du XIXème siècle ouvrant ainsi de nouveaux chemins artistiques au siècle naissant. Un lieu qui marquera l'histoire de l'art moderne par son intense activité créatrice.
Le Bateau-Lavoir fait l'objet d'un classement au titre de monument historique, malheureusement un incendie ravage en mai 1970 une partie du bâtiment qui sera reconstruite à l'identique en 1978.
"Folie Richelieu", "Tivoli", "Palace Théâtre", tels sont les noms qui ont été successivement donnés au Casino de Paris, car c'est de cet établissement qu'il va être question ce soir...et pour fêter ce 200 ème billet (et oui, déjà..), vous aurez, cher lecteur, deux articles pour le prix d'un....
encore situé en rase campagne, dans les faubourgs de la capitale. En 1811, après les déboires révolutionnaires, elle est transformée en parc d'attraction juste avant que la construction de l'Eglise de la Trinité à quelques dizaines de mètre de là nécessite sa démolition, l'emplacement fut ensuite dédiée à une patinoire, à la fin du XIXème siècle. C'est en 1911 que l'établissement devient une salle de cinéma et de music hall, et c'est d'ailleurs dans cette salle que se produisit le premier spectacle de music hall avec des danseuses nues. La première guerre mondiale et les bombardements, oblige une fermeture momentanée pour ensuite faire connaitre le succès à de nombreux artistes, et le plaisir aux parisiens.
Il m'évoque aujourdhui comme un gros bateau à aube, tout en rondeur et en vagues, le teint clair...les lignes sinueuses et pures qui se découpent dans le ciel renforcent encore un peu plus cette impression. Les décorations de fleurs en mosaïques pastels renvoient directement au registre de l'art Nouveau, avec les fleurs, les entrelacs, et surtout ce grand vitrail représentant une scène festive. A l'intérieur, les lumignons courant en frise sur juste en dessous du plafond, rappelle les courbes de la façade extérieure et rappelle le mouvement des vagues.
Bien avant que le commerce ne se fasse sur le net, les parisiens faisaient (ou faisaient faire) leurs emplettes dans les épiceries et autres petites échoppes, situées dans les ruelles, sur les trottoirs des faubourgs ou encore sous les passages couverts du coeur de Paris....Haussmann a véritablement bouleversé la donne en modifiant le profil urbain de la capitale. Ses travaux de développement et de modernisation ont permis, outre un assainissement, mais aussi une toute autre façon de vivre dans Paris et de consommer.
commerce dès son plus jeune âge et qui va révolutionner les méthodes commerciales en ce XIXème siècle placé sous les auspices de la modernité, de l’industrialisation. C'est à cette époque que le jeune homme ouvre sa première boutique où les prix sont pour la première fois fixes et affichés.
L'opulente rotondité, qui grimpe sur plusieurs étages, marque généreusement la réussite de son propriétaire et invite à visite une tranquille ente le différents étalages....ceints par une vitrine longue de 22 mètres. Tout dans la réalisation de cet immeuble marque sa vocation commerciale mais aussi, avec presque une certaine suffisance, la prospérité de l'entreprise. Un fait appuyé puisqu'une seconde boutique, du même acabit viendra également s'installer quelques temps plus tard, boulevard Malesherbes, voie Haussmanienne par excellence, traversant le cossu et nouveau huitième arrondissement. 
Une petite dédicace ce soir à Désiré...en ce 26 mars qui est jour un peu particulier pour lui et évoquer une façade qui reste associée à ses souvenirs d'étudiant. Fantasme gastronomique et
edingote, chapeaux haut de forme et petite moustache soignée......mais cette époque est bel et bien révolue ! A l’extérieur, les boiseries lie de vin et l'enseigne au néon, éclairant en permanence non seulement la façade mais aussi une partie de la rue, se voient de loin....
Le second arrondissement n'est pas qu'un quartier rempli de petits ateliers de confections dont on entend parfois le ronronnement des machines à coudre le dimanche... Pendant plus d'un siècle, ce quartier entre les rues de Richelieu, St Marc, Montmartre et Réaumur fut le royaume de la presse. Rue de Richelieu siégeait "le Temps", "Le Journal", "L'Humanité", "L'intransigeant" passa de la rue du Croissant à la rue Réaumur qui abrita aussi "Paris soir" puis "France soir", En face au 111 et 113, de la rue Réaumur se tenaient "la République" et "la Liberté". rue St Marc logeait "le National". Le quotidien "La France" fut installée au 123 puis, au 144, rue Montmartre. Plus récemment la rue du Louvre hébergeait il y a encore quelques années les locaux du Figaro....mais je voudrais aujourd'hui remonter un peu le temps et évoquer dans ce billet, la petite histoire du 144 de la rue Montmartre que j'évoquais à l'instant...où "La France" mais aussi "l'Aurore" y ont relaté petites et grandes "unes" dont l'une d'elles justement resta célèbre...mais j'en reparlerai d'ici quelques lignes...arrêtons nous donc tout d'abord sur cette façade..qui ne passe pas vraiment inaperçue.... 
Aux côtés de ces dames, fléchissent deux atlantes qui semblent presque effrayés par le poids du Journal... Est ce le côté dramatique des actualités qu'ils voient sortir de ce bâtiment dont ils symbolisent l'entrée qui leur donne ce rictus (?)....si les deux hommes jettent un oeil par dessus leur épaule comme submergés et dépassé par la tâche qui leur a été confiée, les muses, elles semblent regarder le passant d'un air goguenard, amusé, détaché...du haut de leur piédestal...
l'histoire de la fin de notre tumultueuse IIIème République...C'est en effet précisément l'exemplaire du 12 janvier 1898 qui restera à jamais gravé, non pas dans la pierre mais dans les livres d'histoire des collégiens...car, c'est bien dans cet immeuble qu'à l'aube du nouveau siècle va se dénouer une des pages de l'histoire de France. C'est ici au 144, rue Montmartre que remit Emile Zola à Georges Clémenceau, alors rédacteur en chef pour le quotidien, sa lettre pour le président de la République Félix Faure démontrant l'innocence d'Alfred Dreyfus et proclamant "la vérité est en marche et rien ne l'arrêtera". Le célèbre réquisitoire de l'écrivain défendant celui qu'on voulait voir banni de la société paru le le lendemain sous le titre historique "J'accuse", un titre choc qui permit d'innocenter celui qu'on accusait à tort d'espionnage et de trahison. Certte affaire qui divisa la France en deux parties pendant des années amena une succession de crises politiques et sociales uniques en France. C'est par cet épisode que la presse commença à prendre une part importante dans la vie politique et sociale. Alors même si le quotidien de la IIIème République a maintenant fait place au rez de chaussée à un magasin hard discount...ces quelques témoignages qui nous restent nous permettent de ne pas oublier cet épisode trouble au relent antisémite.
Quai aux fleurs (4ème arrondissement), une façade retient l'attention du promeneur....sur ce quai où règne le calme et la quiétude flotte un air serein, et une douce tranquillité. Les murs des hôtels particuliers nous font remonter le temps, à travers une sculpture, une plaque commémorative ou une porte. C'est dans ce coin du Paris médiéval qu'aujourd’hui
Les bâtiments, en question ce soir, ne datent pas de l'époque où colombages, encorbellement et
Mais que présentent ces murs de si particulier ? Peu de choses en réalité, outre la plaque gravée qui indique le passage du couple vers 1118, ce sont des ornements élaborés au XIXème siècle qui renvoient directement à l'imagerie moyen-âgeuse qui attire le regard du passant : les masques du philosophe et de sa compagne, au dessus de chacune des entrées d'immeubles, ainsi que les petits mascarons plaqués au centre des portes, la tête tournée l'une vers l'autre, des clichés directement issus du style Troubadour qui fait alors fureur dans les arts décoratifs. C'est presque plus l’émotion que cet emplacement peut susciter dans nos esprits d’aujourd’hui qui rend cette adresse notable. C'est la juxtaposition entre le Paris (et la société au sens plus large) sous Louis VI, et le reflet de Notre Dame dans la Seine coulant paisiblement devant cette maison, et celui que nous connaissons en ce XXIème siècle parfois bien tourmenté, qui rend l’histoire de ce lieu émouvante.
Ensuite, que dire de plus, que certainement le romanesque et le tragique ont pérennisé ces
deux personnages dans notre histoire et notre mémoire collective, comme dans l'histoire de la capitale. Il faut bien rappeler que le parcours des amants se passe essentiellement dans Paris, où officie sur la montagne Sainte Geneviève et avec une maitrise non démentie, le philosophe et théologien Abélard, intellectuel surdoué, dialecticien redoutable pour ses adversaires et maitre admiré par ses élèves. Outre le fait de marquer ses auditeurs, il marque également son siècle dans le domaine de la logique, et de l'analyse du langage. Sa vie sera une succession d'épisodes plus ou moins mouvementés (entre la Bretagne, la Champagne et la capitale). Sur le plan intellectuel s'il marque son temps, il ne marque pas non plus vraiment la postérité. C'est son destin tragique lié à celui d'Héloïse qui le fait rentrer dans les livres d'histoire. L'amour entre un homme de foi, de raison et d'esprit et admiré de tous, pour son élève, jeune fille de rang, promise à un destin autre que celui que la passion clandestine lui fera finalement embrasser.
Alors qu'est ce qui fascine donc chez ce couple hors du commun ? Son histoire a traversé les époques et a inspiré les auteurs en tout genre probablement du fait du paradoxe entre l'amour passion et la raison : Héloïse et Abélard illustrent avant l'heure ce que Pascal écrira quelque siècles plus tard : "le coeur a ses raisons que la raison ne connait pas" : le statut d'homme d'esprit et d'Eglise que revêt Abélard lui interdisant le mariage, le drame de cette relation soumise aux lois de la société hératique et morale du Moyen-Age s'oppose, de fait, à la passion amoureuse et passionnément charnelle. Le drame de "l'amour écorché", car honni, de la castration peu après un mariage clandestin et une descendance illégitime étonne encore et toujours et émeut. L'amour passionnel bafoué et la déchirure physique infligée sont transcendés par l'amour profond, durable, intellectuel, pieux, vécu dans une fidélité sans faille malgré l'éloignement et l’engagement des deux époux dans la religion.
Les numéros 9 et 11 du Quai aux Fleurs rappellent ainsi au passant que les turpitudes du coeur et les aléas de la vie ne sont pas le fait du XXIème siècle moderne mais, ont de tout temps marqué la condition humaine de notre civilisation.
J'aurais également pu intituler ce billet "Les mille et une vie de la Maison dorée", tant cette adresse aujourd'hui noyée dans la fébrilité parisienne a connu d'heures lumineuses pour ne pas dire scintillantes....
Elle en a connu des histoires cette « Maison Dorée », des idées sont nées sous les ors des médaillons, des destins se sont enlacés et noués sous ses plafonds sculptés, elle a fait beaucoup parler d'elle, a été le cadre de bien des festivités, un lieu huppé et recherché, réputé, un phare dans la capitale, à une époque où la Tour Eiffel n'avait pas encore revêtu son propre habit de lumière puisqu'elle n'existait pas encore, même pas sur des plans…
Son histoire commence durant le Directoire, sous l’impulsion de Mme Tallien, LA « Merveilleuse » de Paris qui fait déjà des salons de son hôtel Choiseul-Stainville un lieu de rencontre très prisé par les têtes révolutionnaires un peu échauffées. Après le passage de la belle, l'hôtel est démoli pour faire place au « Café Hardy », table déjà très réputée sous l'Empire et dont on disait qu’elle était la plus chère de Paris. C'est alors le lieu de rendez vous des agents de change et des clients huppés tels que le général Rostopchine ou le général Gérard. 
Mais les bouleversements et les grands travaux ont lieu vers 1839, quand le bâtiment change de main. Toujours sous les auspices de la gastronomie, le restaurant perdure dans la tradition de la bonne table française, courue et fort bien fréquentée. Repris en main par son propriétaire Louis Verdier, c'est à cette date (ou presque) que les travaux d'embellissement et de décoration vont être spectaculaires. Louis Verdier baptise son établissement "le restaurant de la cité", mais comme le rapporte Balzac, "le public qui ne l'entendit pas de cette oreille, devant les dorures, les balustrades et les balcons rutilants, l'appela (communément) "La Maison dorée", nom qui s’imposa par la suite". L'opinion publique faisant écho à la remarque de Gérard de Nerval qui qualifie pour sa part cette bâtisse de "maison d'or décorée de pierre"....
Il faut dire que les travaux sont si importants que le résultat est pour le moins clinquant...l'architecte Victor Lemaire voyant les choses en grand : balcons dorés, encadrements des baies du même éclat auxquels s'ajoutent des médaillons et des frises sculptées par les frères Lechesne, où parmi les branches et les rinceaux, courent des cerfs et des sangliers. Ceci pour l’extérieur ; les décorations intérieures réservant encore au client fortuné de belles surprises avec peintures, glaces, ors et l’ameublement qui éblouissent à eux seuls le regard, boiseries sculptées et plafonds ciselés venant parfaire l'attraction que représentent déjà en soi la façade extérieure.
Lieu de rencontre pour tous, pour les fortunés comme pour les modestes; les intellectuels, les grands noms mais aussi la petite bourgeoisie, la Maison Dorée règne sur le Paris du XIXème siècle, l'illuminant de son faste, de sa réputation de son animation, à l'époque où l'urbanisme se développe mais où la capitale reste encore à taille suffisamment humaine pour qu’une adresse comme celle que je décris conserve une véritable influence sur les autres.
Un grand restaurant donc qui a ses habitués, que l'on reçoit, à l’inverse du « tout venant », à l'abri des curieux dans des cabinets privés dont
l'entrée se trouve rue Laffitte sous le fronton au nom avenant « Cité des italiens ». Il suffit de voir l'importance donnée à cette entrée pour comprendre que le lieu de rendez-vous a été sans doute un haut lieu de rencontres en tout genre, de festivités et d'échanges en société, une adresse pour ceux que l'on appellerait aujourd’hui noceurs et fêtards.....Se retrouvent ainsi dans ces salons, et guidés par ceux que j'appelle "les anges de la cité", Edouard VII, Lord Sémour, le Baron de Saint Cricq et tout ce que Paris peut compter à cette époque de princes, comtes, marquis et autres excentriques fortunés, prêts à alléger leur portefeuille pour pouvoir goûter aux fastueux diners arrosés de bouteilles tirées de la cave somptueuse qui n'en compte alors pas moins de 80 000...
Ce lieu de rendez-vous voit aussi se croiser des hommes de lettres et des intellectuels : Emile Zola y fêtera le succès de "l'Assommoir", Balzac y laissera quelques lignes appuyées, y créant son Lucien de Rubempré, et Proust y consacrera l’amour de Swann pour Odette... Flaubert et les frères Goncourt y firent également de nombreuses viites. Les frères Verdier, propriétaires des lieux, réussissent ainsi à faire de cet endroit, le centre de la vie culturelle, et politique de la capitale, le coeur, l'esprit et l'estomac du boulevard, c'est à dire de Paris. Les grands boulevards étant en effet en ce XIXème siècle bruissant de bouleversements, le symbole de la capitale.
Mais la vie de cette maison est loin de s’achever au bas d’un menu ou à l’épilogue d’un roman...Après les nourritures du corps et de l’esprit, voici l'édition...Dans le même "pâté de maison" (on reste dans la grande bouffe) aux côtés du restaurant, d'autres nourritures intellectuelles se créent : ainsi "L’évènement", « Paris", "Les mousquetaires" (fondé par Alexandre Dumas en 1853),"La presse" voient ainsi le jour entre 1850 et la fin du XIXème siècle, période où les bureaux de "la Revue Blanche" prennent également leurs quartiers dans les locaux du boulevard des italiens.
Et après les quotidiens, la peinture… En effet, la "Maison dorée" voit aussi durant les dernières décennies du siècle, s'animer de couleurs et de poésie dans un nouvel élan de modernité, annonçant ainsi le siècle dont on semble déjà pressentir les bouleversements intellectuels et artistiques. C’est là que se tient pendant plusieurs années le salon des impressionnistes. En 1886 se tient notamment la dernière tentative des peintres que l'on étiquette alors comme "hors les clous" d'exposer leur œuvres…celles là même qui orneront plus tard les cimaises des grandes colletions et des musées... On retiendra notamment la participation de Mary Cassatt, Degas, Gauguin, Morisot Pissarro, Redon Seurat, Signac, ou encore Vignon.
Malgré la démolition générale des numéros pairs du boulevard des italiens, "La Maison dorée" reste debout mais ferme définitivement ses portes en 1902. L'immeuble va alors connaitre par la suite divers occupants, dont un bureau de poste qui imposera des travaux propres à l'activité de cette administration. Les dernières modifications auront lieu lors de l'installation des bureaux et de la salle de marchés de la BNP, dans les années 1974-1976, date à laquelle l’établissement
Ainsi "la Maison d'Or", comme on appelait cette adresse à l'époque balzacienne, a vu défiler hommes de lettres, hommes de goût, grands personnages et petites vertus, hommes d'art et hommes d'argent, des destinées bien différentes mais un même désir de profiter de la vie, de Paris et de tout ce que la capitale peut compter de plaisirs et d'intérêts. Les médaillons dorés, les cerfs et les sangliers, marquent un XIXème fait d'éclectisme ambiant, tant dans les arts décoratifs que dans les esprits et dans les relations entre les différents groupes de la société.
Ce qui m'a le plus intriguée dans ce bâtiment c'est l'entrée de la Cité des Italiens, amenant aux anciens cabinets privés...symbolisée par ces anges aux courbes avantageusement féminines et qui semblent indiquer le chemin à suivre pour vivre quelques instants d'un plaisir raffiné, en société. Aujourd'hui, elles ornent innocemment la façade des bureaux de la BNP, et s'il n'y a pas de fonds dans ces locaux, elles semblent vouloir dire : « les coffres, c'est par ici ».....
La pluie tombe sur la capitale... alors pour ne pas laisser le billet du jour immaculé, je profite des gouttes de cette fin de semaine pour ouvrir une nouvelle catégorie d'articles à ce blog et lui dédier quelques lignes sur un sujet à caractère tant historique qu'artistique qui me tient particulièrement à coeur. Eléments architectural, expressions diverses et variées transmises au fil des siècles, ils ornent les dessus de portes, grimacent au dessus des bateaux mouches qui passent sous le Pont Neuf, sont plaqués sur les fontaines, les linteaux, les clefs de voûtes des églises, ou tout simplement sur les façades d'immeubles. Vous aurez sans doute deviné après cette petite énumération que je souhaite évoquer ce soir le cas des mascarons. Si Paris en compte une tripotée, des villes comme Bordeaux ou Lyon ne sont pas non plus en reste, sans parler de nos voisines italiennes à qui l'ont doit cette mode décorative.
On peut sans dout avancer que le premier mascaron à proprement parler est le masque de la Méduse, l'une des trois gorgones de la mythologie grecque. Dans l'antiquité on trouvait ces figures (en polychromie), à l'extrémité des toits et que l'on appelait à juste titre "antéfixe".
En France, c'est François Ier qui va développer l'utilisation de ces visages dans l’architecture civile et privée. Le château de Fontainebleau reste d’ailleurs à ce titre un exemple de qualité.