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  • Paris à cheval : Sous la "France renaissante", une jeune guerrière...

    Le 21/08/2011 à 18:52Paris à chevalCommentaires (2)Ajouter un commentaire

    Oui il s'agira d'une renaissance ce soir dans cet article néanmoins placé sous le signe du cheval puisqu'une statue équestre sera donc ici évoquée, et pas n'importe laquelle. Je n'évoquerai en effet ni roi, ni empereur, ni héros, mais tout simplement une allégorie de notre pays, qui marque notre histoire moderne, celle de la "France renaissante". Symbole d'un pays qui sort triomphant de la bataille livrée à l'ennemi, symbole d'un pays qui garde son identité et sa liberté et qui renait de ses cendres.

    Allégorie donc, située au centre du pont Bir Hakeim (charnière entre les 15ème et 16ème arrondissement), évoqué pas plus tard que dans l'un de mes derniers billets, sur un terre plein circulaire qui termine, en amont, l'allée des Cygnes. Face à la Seine, tournant le dos au viaduc, la statue semble presque prendre son envol..... Exécutée en 1930 par le sculpteur danois Holger Wenderkinch elle est offerte à la ville de Paris par la communauté danoise.
    Alors qu'elle était censée représenter Jeanne d'Arc, sainte patronne de la France, la statue déplaît à la commission chargée de valider les édifices commémoratifs publics, qui ne reconnait pas dans les traits et la posture guerrière du personnage représenté l'image traditionnelle véhiculée par la pucelle d'Orléans. Pour éviter tout incident diplomatique avec le Danemark, il est finalement décidé de la rebaptiser "la France renaissante", de manière à lui retirer sa portée commémorative pour ne lui donner qu'un rôle décoratif (la commission n'ayant à donner son aval uniquement pour les éléments de commémoration). Elle est finalement installée en 1958.
    Cet sculpture équestre représente donc un guerrier (à défaut d'une Jeanne d'Arc, je dirai guerrier mais le personnage m’apparaît plutôt androgyne, voire féminin...), sur son cheval, brandissant d'un bras une longue épée tendue vers l'avant, en plein assaut, de l'autre un étendard, tendis que le cheval est au galop.Si la statue a été dénigrée, la référence à Jeanne d'Arc est pourtant bien criante et relativement fidèle il me semble à l'image que l'on peut se faire de cette jeune femme qui était bel et bien une guerrière.....son armure (féminine !), mais aussi son étendard, son épée, et plus subtilement son auréole. Tout dans cette sculpture transpire l'allégorie et un grand lyrisme. Une vraie fusion semble régner entre le cavalier et sa monture, ils ne font presque plus qu'un dans l'élan de l'assaut, qui semble instinctivement, déjà victorieux....
    Cette fusion se perçoit entre les deux éléments principaux, les deux protagonistes semblent en réalité ne plus faire qu'un (il faut dire qu'un cavalier sans sa monture ne gagne rien...), le corps du cavalier semble épouser la lignes et les formes de son cheval, pour à certains endroits, se confondre comme par exemple au niveau de sa jambe gauche.
    L'artiste a sensiblement eu le souci de la symétrie qui contribue à l'équilibre et à la dynamique de l'ensemble. Le bras et le sabre tendus sont parallèles à la tête du cheval tendis qu'à l'autre extrémité de la statue, c'est l'étendard et la croupe de la monture qui sont en osmose, comme une réponse harmonieuse avec l'avant du groupe. De même à la base de l'édifice, le mouvement du galop apporte autant de symétrie qu'en l'air, ce que n'aurait pas évoqué un trot ou une marche au pas.
    Le mouvement est intégralement tourné vers l'avant et surtout en quête de hauteur, la tête du cheval semble apporter à lui seul le signe d'une victoire et d'une renaissance que vient encore accentuer la représentation de la bête au galop. Par cette dynamique empreinte d'une grande fluidité cette statue semble presque avoir été faite pour cet emplacement précisément du fait de sa couleur vert d'eau qui fait presque écho à la Seine (même si cette dernière ne fait pas état d'une grande pureté....), mais aussi des lignes sinueuses qui m'évoquent instinctivement l'onde, une conquête presque fluviale, un emplacement pour un grand destin, une renaissance... 
    Il ressort également une grande pureté qui correspond au personnage initialement représenté, mais aussi à l'idée que l'on peut se faire d'une naissance et donc d'une renaissance....cette pureté se traduit par les lignes, le mouvement et les volumes donnés à cet édifice.
    Il est bien dommage que cette statue ne soit pas plus mise en valeur et ne soit pas plus connue, car elle mérite un intérêt, tant sur le plan artistique, que symbolique et même politique.....c'était à l’origine un cadeau...

  • Paris à cheval : Don Quichotte a trouvé ses moulins place Laurent Herr...

    Le 26/06/2011 à 17:17Paris à chevalCommentaires (0)Ajouter un commentaire

    Ce soir il sera question d'une statue équestre un peu particulière.....une petite statue peu connue, dans un coin un peu à l'écart de l'animation du 5ème dans lequel elle est placée. Dans le petit jardin de la place Laurent Herr, à quelques dizaines de mètres à peine de la rue Mouffetard et de son ébulition en tout genre, sur un piedestal en pierre, à hauteur d'homme, se cabre une drôle d'apparition. Un statue équestre d'inspiration cubiste, sur laquelle est juché un cavalier.

    Il m'est spontanément venue à l'esprit le personnage de Don Quichotte pourquoi, je ne sais pas vraiment...mais c'est en mémoire de cet aventurier touchant d'humanité et teinté d'un brin de romantisme que je souhaite rédiger ces quelques lignes en imaginant que c'est notre aventurier au grand coeur qui se dresse fièrement sur la place Laurent Herr.

    Don Quichotte de la Manche est un personnage imaginaire tout droit sorti du roman à succès de Miguel de Cervantès : El Ingenioso Hidalgo Don Quijote de la Mancha. Ce roman a été publié en deux volumes, le premier en 1605 et le second en 1615.

    Ce roman retrace les voyages et les aventures de Don Quichotte et Sancho Panza. Don Quichotte est un Hidalgo (gentilhomme de la noblesse) obsédé par la chevalerie et Sancho Panza, un paysan obsédé par la nourriture, est son écuyer. Le premier est un chevalier errant et illuminé qui part combattre le mal à travers l’Espagne sur son cheval : Rossinante. Le second, tout en se remplissant la panse, sait que son maître est fou mais décide de l’aider à protéger les opprimés et à retrouver sa Dulcinée.

    Il faut dire que cette vision de Rossinante est assez approximative et la taille de l'oeuvre semble refléter les ambitons de notre héros (malgré lui ?...). Quelques angles, des lignes plutôt abruptes mais l'idée de l'équidé est là. Pour achever cette parenthèse "Cervantesque", voici un des extraits les plus célèbres de cette oeuvre à portée universellement et intemporellement symbolique.

    "Là-dessus ils découvrirent trente ou quarante moulins à vent qu'il y a en cette plaine, et, dès que don Quichotte les vit, il dit à son écuyer: "La fortune conduit nos affaires mieux que nous n'eussions su désirer, car voilà, ami Sancho Pança, où se découvrent trente ou quelque peu plus de démesurés géants, avec lesquels je pense avoir combat et leur ôter la vie à tous, et de leurs dépouilles nous commencerons à nous enrichir : car c'est ici une bonne guerre, et c'est faire grand service à Dieu d'ôter une si mauvaise semence de dessus la face de la terre. —Quels géants ? dit Sancho. — Ceux que tu vois là, répondit son maître, aux longs bras, et d'aucuns les ont quelquefois de deux lieues. —Regardez, monsieur, répondit Sancho, que ceux qui paraissent là ne sont pas des géants, mais des moulins à vent et ce qui semble des bras sont les ailes, lesquelles, tournées par le vent, font mouvoir la pierre du moulin. —II paraît bien, répondit don Quichotte, que tu n'es pas fort versé en ce qui est des aventures : ce sont des géants, et, si tu as peur, ôte-toi de là et te mets en oraison, tandis que je vais entrer avec eux en une furieuse et inégale bataille. " Et, disant cela, il donna des éperons à son cheval Rossinante, sans s'amuser aux cris que son écuyer Sancho faisait, l'avertissant que sans aucun doute c'étaient des moulins à vent, et non pas des géants, qu'il allait attaquer. Mais il était tellement aheurté à cela que c'etaient des géants qu'il n'entendait pas les cris de son écuyer Sancho, ni ne s'apercevait pas de ce que c'était, encore qu'il en fut bien près, au contraire, il disait à haute voix : "Ne fuyez pas couardes et viles créatures, car c'est un seul chevalier qui vous attaque." Sur cela il se leva un peu de vent et les grandes ailes de ces moulins commencèrent à se mouvoir, ce que voyant don Quichotte, il dit: " Vous pourriez mouvoir pllus de bras que ceux du géant Briarée: vous allez me le payer " Et, disant cela, il se recommanda de tout son coeur a sa dame Dulcinée, lui demandant qu'elle le secourut en ce danger, puis, bien couvert de sa rondache, et la lance en l'arrêt, il accourut, au grand galop de Rossinante, donner dans le premier moulin qui était devant lui, et lui porta un coup de lance en l'aile : le vent la fit tourner avec une telle violence qu'elle mit la lance en pièces, emmenant apres soi le cheval et le chevalier, qui s'en furent rouler un bon espace parmi la plaine".

  • Paris à cheval : Epopée classique au Cirque d'hiver...

    Le 12/06/2011 à 20:12Paris à chevalCommentaires (0)Ajouter un commentaire

     Il y a quelques mois j'évoquais le cirque d'hiver pour l'ensemble de son bâtiment, son histoire et sa place dans Paris, si j'y reviens aujourd'hui c'est simplement pour évoquer un détail de décoration qui rentre dans ma promenade dominicale à quatre pattes ou plutôt huit...Car ce sont en effet des deux chevaux qui surplombent l'entrée de la salle de spectacle dont il s'agira ici.

    Si deux montures encadrent l'entrée du cirque, ce n'est pas par hasard, puisque la vocation première de ce lieu de divertissement était l'art équestre (d'où ce répertoire décoratif), il fut néanmoins un temps utilisé pour promouvoir les débuts du cinéma pour ensuite revenir aux activités de spectacle vivant, au cours du XXème siècle. Egalement loué pour diverses manifestations de variétés, il revient définitivement au domaine du cirque en 1999. 

    A l'heure des grands travaux parisiens, le Cirque d'Hiver est construit en 1852 par Jacques Ignace Hittorff
    à la commande de Louis Dejean, déjà propriétaire du Cirque d'Eté (aujourd'hui disparu, il se situait à l'emplacement de l'actuelle rue du Cirque (8ème)). Il est construit dans la rue Amelot  qui longe le boulevard Beaumarchais, reliant la Place de la République à la Place de la Bastille.  Les bas reliefs sont directement issus du registre néoclassique de James Pradier, et les deux statues équestres sont ont été réalisées par les sculpteurs Duret et Bosio.  

    Le bâtiment est tout d'abord baptisé "Cirque Napoléon"du nom du Prince qui l'inaugure le 11 décembre 1852, puis"Cirque National" en 1907, pour adopter son nom actuel en 1973. De forme polygonale (20 pans précisément), il peut contenir jusqu'à 5000 personnes, toutefois, lees normes de sécurité actuelles en restreignent l'entrée à 1650 spectateurs aujourd'hui.  Il est classé au registre des monuments historiques depuis 1975. Le bâtiment a fait l'objet d'une récente rénovation en 2007 permettant notamment un rafraîchissement des façades.

    Mais penchons nous un peu plus sur ces deux cavaliers que l'on doit aux sculpteurs Duret et Bosio, chefs de file du style néo classique alors très en vogue au début du XIXème siècle. Les deux artistes se sont ici véritablement attachés à rendre l'animal dans sa réalité et dans le mouvement : ainsi l'anatomie a été véritablement étudiée par les artistes, les muscles saillants, les nerfs et les tendons le montrent et rappellent combien les artistes de cette époque travaillaient l'académie.
     
    C'est par ce souci de véracité que nous sont transmises, la fougue, la nervosité, la réactivité de l'animal. Cette "animation naturelle" est retenue et encadrée par la placidité et par le flegme de leurs cavaliers qui restent égaux à eux mêmes,le regard perdu dans le vide, alors que leurs montures semblent être quant à elles dans une certaine frénésie et une impatience non dissimulée.

    Une jeune femme à gauche, un jeune homme à droite, ces deux cavaliers sont parés de vêtements et d'accessoires rappelant les combats antiques : casques, armures, drapés...tout contribue à renvoyer à une scène de la Rome antique, registre qui revient classiquement dans les oeuvres de cette période néco classique, que ce soit dans la peinture comme dans les sculptures ou même les arts décoratifs.

  • Paris à cheval : Hommage à Bertie

    Le 05/06/2011 à 17:40Paris à chevalCommentaires (0)Ajouter un commentaire

    Après les combattants carolingiens sur le chemin de Roncevaux, nous avencons, que dis je trottons, un peu plus au Nord, quitter l'Ile de la Cité pour un autre écrin, plus restreint, dans un endroit, caché, en retrait, à l'abri de bien des regards.

    Non loin de l'Opéra Garnier dans le prolongement des grands boulevards, sur le chemin qui mène à l'église de la Madeleine, se cache une petite place dont l'environnement direct est composé de bureaux, d’une résidence hôtelière, de logements, commerces et théâtres. Aujourd'hui, bien des indices évoquent le personnage dont il sera question ici...en quittant le boulevard de la Madeleine, on  passe devant le magasin  Old England, on prend la rue Edouard VII, on longe le magasin "Bertie", et on se retrouve devant le théâtre Edouard VII et par la même occasion au pied de la statue équestre qui rend hommage au roi.

    C'est donc de ce dernier dont il sera question dans ce billet. Pourquoi a t-on donné ce nom à ce théâtre et pourquoi cet hommage à ce
    roi anglais, je n'ai pas de réponse...mais cela n'empêche pas de s'attarder quelques instants sur la statue en question.
    Dans la cour octogonale bordée de colonnades avec lesquelles joue le soleil accrochant leur ombre sur les pavés, s'avancent le roi juché sur son calme et fier destrier. Sculpture de bronze réalisée par Paul Landowski après une commande, elle est fondu par Alexis Pudier.

    Aux chevaux forts et robustes des statues royales évoquées précédemment, se présente ici une expression de calme et d'élégance naturelle. Pas de combat, pas de bataille pas de nervosité et de cabrures, mais un pas mesuré dont on pourrait presque entendre le bruit du  sabots résonnant sur les pavés de cette cour fermée.

    Le roi est vêtu de son habit de commandant des armées et coiffé d'un chapeau à plumes. Plusieurs éléments rappellent clairement l'identité de notre bonhomme : d'une part sont statut de monarque avec sa cape, ses décorations, et son couvre chef que viennent parfois égayer quelques pigeons zélés.... mais aussi un attribut qui permet d'identifier notre homme, cette barbe qui est bien fidèle à celle qu'arborait le roi. La tête haute et le regard un rien goguenard je trouve, le roi tourne la tête légèrement vers la gauche, comme s'il saluait ses sujets...ou ses soldats.

    C'est la finesse qui se dégage de cet ensemble même si le cavalier est un peu bedonnant... Pour autant, il ressort une véritable une impression d'élégance sûre de la part des deux protagonistes. L'équidé qui va à l'encontre  de nombreuses statues équestres souvent dans la représentation robuste, imposante, surélevée et presque inaccessible au sens propre comme au sens figuré. 

    De plus, les chevaux habituellement croisés dans nos promenades parisiennes sont représentés comme des chevaux de combat. Ici il ressort plutôt le flegme et la finesse (à l'anglaise...) et la notion d'apparat.

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  • Paris à cheval : Sur le chemin de Roncevaux...

    Le 29/05/2011 à 18:07Paris à chevalCommentaires (0)Ajouter un commentaire

    Sur le parvis de Notre Dame, au milieu des feuillages qui lui offrent un élégant camouflage au printemps et en été, se dresse, presque dans la discrétion et dans le retrait, celui qui fut pourtant l'une des plus grandes figures de l'Histoire de France. Celui qui a inventé l'école (enfin, c'est ce que dit la chanson pas les historiens...mais attention je m'égare déjà dès les premières lignes...), mais surtout celui qui marque la charnière entre l'ère carolingienne et le début du Moyen Age. Vous l'aurez compris j'évoquerai ce soir au cours de ma petite promenade à cheval dans Paris, le grand Charlemagne. 

    Mais peut-être comme beaucoup de parisiens, ou de visiteurs, n'avez vous jamais remarqué cet ensemble de bronze qui s'élève, presque humblement, malgré toute la superbe qu'on lui a donné, aux pieds de notre si emblématique cathédrale. Pourtant cette statue, ou devrais je dire plutôt ce groupe équestre, est tout de même là depuis 1882, donc difficile de l'ignorer et passer à côté de lui serait bien dommage, car il y a beaucoup à dire sur cette réalisation très représentative du XIXème siècle. Alors arrêtons nous quelques instants devant cette oeuvre et plongeons notre regard dans celui du cheval, histoire de remonter un peu le temps....

    Nous devons cette sculpture aussi monumentale qu'imposante aux frères Charles et Louis Rochet qui s'atèlent à rendre un hommage à l'empereur carolingien dès 1853, en vue de l'exposition universelle de 1867. Cette première édition est réalisée en plâtre, la seconde, celle qui trônera à l’exposition universelle de 1878, sera en bronze, sortie de la fonderie Thiébaut. Quand ont sait que la réalisation d'une statue équestre est à chaque fois une prouesse artistique et technique on peut imaginer que ce groupe de bronze peut être qualifié  de réussite majeure de la fonderie parisienne. C'est donc en 1882 que le conseil municipal de Paris décide de placer Charlemagne et ses Leudes (puisque tel est le titre exact de cette réalisation) sur le parvis de Notre Dame.
    Bien en hauteur sur son piédestal de pierre, l'empereur se tient sur son cheval, un long sceptre dans le bras droit, ouvert dans un geste de majesté, que dis-je d'impérialité.....A ses côtés, ses deux leudes (écuyers), que sont Roland et Olivier les propres neveux du conquérant, ouvrent la marche dans une mise en scène qui n'est pas vraiment feinte. 
    Si d'autres réalisations du XIXème siècle, comme les précédentes statues évoquées (les trois dernières notamment), témoignaient d'une certaine simplicité dans le rendu, on remarquera ici un souci du détail voulu par les deux concepteurs de ce groupe équestre. En ajoutant à l'acteur principal deux personnages secondaires (mais non moins insignifiants), les sculpteurs ont apporté à la statue équestre traditionnelle un réelle valorisation, notamment par les différents axes de composition et la multiplication des points de vue. En respectant les connaissances archéologiues de l'époque, ils s'attachent à retranscrire la véracité  historique : ainsi, Roland est armé de l'exacte copie de l'épée Durandal et Charlemagne porte la réplique de la couronne dite de Nuremberg.
    D'autres éléments apportent encore un peu plus de souvenirs historiques, comme l'habillement des trois hommes, l'armurerie, le harnachement du cheval et ce sceptre dont l'extrêmité est décorée d'une statuette à l'effigie d'un roi sur son trône. La seule fausse note serait peut-être cette barbe presqu'imposante qui colle décidément à la peau du bonhomme (ou plutôt à l'image que l'on a de cet empereur) mais qu'il n'avait parait il pas, les pièces de monnaie à son effigie en témoignant (la légende de la "barbe fleurie" est donc tenace....).
    Je soupçonne également un léger anachronisme dans la représentation de notre empereur visionnaire : Les sculpteurs nous présentent le visage d'un vieillard alors que l'empereur a fait le plus important de son règne et de ses conquêtes dans la fleur de l'âge, et que l'épisode de Roncevaux et de la guerre contre les maures est bien en amont de son règne, alors qu'il est dans la trentaine...
    Aux niveaux de protection déjà évoqués dans d'autres statues équestres, que sont le piédestal, le cheval et l'harnachement, ont été ici ajoutés des protections plus symboliques mais néanmoins réelles: la présence de ses troupes incarnées par ses leudes, mais aussi le sceptre, la couronne et les armes tenues par les écuyers.
    Nous sommes ici dans une reconstitution historique, une épopée qui oscille entre lyrisme et héroïsme, en tout cas certainement empreinte de romantisme. Mieux qu'un profil frappé sur une pièce de monnaie, qu'une enluminure, qu'une tapisserie ou encore qu'une gravure, cette sculpture met le personnage en scène de façon spectaculaire. Imposant, conquérant, impérial, fort, courageux, mais pas seulement, j'y vois aussi nettement l'image d'un sage, au faite de ses conquêtes réalisées dans un souci d'unité et de paix, le regard perdu au loin, devant le destin non pas d'un seul homme, mais de tout un empire dont l'équilibre reste fragile. La patine du temps, accuse les traits, renforce les expressions et augmentent encore un peu plus l'impression d'étrange.
    Tels des chantres, les frères Rochet ont ici rendu le témoignage d'une époque peut-être trop méconnue, un peu obscure car lointaine, mais qui suscite du coup l'imaginaire, la curiosité et un brin de fantasmagorie. Ce groupe qui semble presque issu de la nuit des temps, semble marcher vers un avenir que seuls nous connaissons, cette image venue d'un autre âge est elle un instantané de l'épisode de Ronceveaux qui coûtera la vie à l'un de ces trois protagonistes ?
    A voir l’accoutrement et les faciès des trois hommes (sans parler de celui du cheval qui semble dire "mais jusqu'où vais je devoir encore le transporter ?"), on se croirait presque transporté dans les pages d'une bande dessinée dont l'action se situerait au Moyen-Age, ou dans un livre "dont vous êtes le héros"ces ouvrages moitié roman, moitié jeu, dans lequel vous devenez le héros d'une aventure. Cette littérature interactive où l'action ne dépend que de votre choix et de votre créativité.... (mais une fois de plus je m'égare...).
    Guerrier mais aussi protecteur des arts et des lettres, celui qui laisse l'Occident au seuil de l'ère moyen-âgeuse avec des fondations de ce qui sera ensuite l'Europe, reste un grand visionnaire et son ambition d'expansion pharaonique marquera ceux qui le succéderont, comme Charles Quint ou Napoléon 1er. Mais au delà d'être le conquérant que l'on connait, Charlemagne reste surtout le père de l'Europe, un restructurateur de l'agriculture et du commerce et surtout l’initiateur de la "renaissance carolingienne" au rayonnement culturel et intellectuel important.

  • Paris à cheval : Chevauchée fantastique sur les toits du Grand Palais

    Le 22/05/2011 à 20:44Paris à chevalCommentaires (0)Ajouter un commentaire

    Poursuivons notre promenade équestre en flânant sur les bords de la Seine.....tout près du Pont Alexandre III.

    En hauteur dans le ciel parisien, se court une chevauchée fantastique...malgré le fait qu'elle soit presque au septième ciel, il ne s'agit pas là d'une épopée sexuelle ou d'une image à connotation érotique encore qu'il n'y ait guère de vêtements sur les sujets mis en scène....mais que nenni...les deux sculptures équestres (deux groupes sculptés mettant à l'honneur des équidés pour être précise) sujets principaux de ce billet font partie intégrante du Grand Palais. 
    Construit pour l'Exposition Universelle de 1900, en même temps que le petit Palais et que le Pont Alexandre III, le Grand Palais, remplace le Palais de l'Industrie qui accueillait avant lui les manifestations culturelles et artistiques. "Monument consacré par la République à la gloire de l’art français" il est classé monument historique depuis 1975 (pour la nef) et 2000 pour l'ensemble du bâtiment.

    Situés au sommet de chacun des deux entrées du Palais, côté Champs Elysées pour l'une, côté Seine pour l'autre, les deux ensembles sculptés évoquent pour chacun d'eux une allégorie. Ces deux groupes sont aussi étonnants qu'inattendus surtout à l'endroit où ils ont été placés. Il sont cependant en parallèle, placés dans une même logique, comme un écho aux décors sculptés "dégoulinant" du pont qu'il jouxte. 
    "L'harmonie triomphant de la Discorde" côté Seine, réalisé par Alexandre Falguière offre au regard du visiteur un char mené par un jeune homme, cheveux au vent, tout attribut exhibé sans pudeur aucune mais plutôt dans une réelle grandeur, le bras gauche ouvert dans un geste de majesté, surplombant un être couché à terre représentant la Discorde. Si l'harmonie est presqu'à poil son ennemi lui est bien dissimulé sous le char et l'équipage dans son ensemble, son visage restant invisible.
    "L'immortalité devançant le temps" de Victor Peter offre le même spectacle au sommet de la porte d'entrée côté Rond Point des Champs Elysées. Là aussi l'allégorie met en scène un homme terrassant un autre, que quatre chevaux ne se gêne pas pour passer par dessus...les gestes sont éloquents, dégageant une certaine magnificence...
    Chaque équipage est mené par quatre chevaux représentés sans harnachement, cette liberté qui leur est donné permettant une expression de naturel et de spontanéité amenant ainsi une certaine authenticité de la scène.
    Il est difficile de détailler les deux représentations dans les accessoires, les décors car malheureusement je ne peux me déporter vers ce septième ciel avec mon pauvre petit appareil photo... Mais ce n'est peut-être pas plus mal car cette séparation laisse à ces deux groupes assez exceptionnels la nécessaire distance qu'implique les concepts qu'ils représentent et au spectateur, un ressenti particulier. Impressionné par ces chevaux qui semblent prêts à vous tomber dessus, on regarde, la nuque renversée ces deux apparitions s'attendant presque à entendre un hennissement et un crissement de roues....
    Ce qui ressort de ces ensembles sculptés c'est également une impression de fougue, de précipitation, mais aussi de grandeur et de majesté, une évocation aux grandes épopées lyriques antiques dont les mouvements et la grandiloquence renvoient également à un certain romantisme. Il y a néanmoins dans ces sculptures, et en dépit qu'elles soient situées nettement en hauteur, et au delà une vraie allure et un grandiose qui transpirent, un petit air presque comique avec ces chevaux galopant dans une position non naturelle, inspirant, en y regardant d'un peu plus près, inévitablement un petit sourire. On s'attend presque à voir les chevaux choir inévitablement tant ils semblent dans une position d'équilibre aussi irréaliste qu'imaginaire.
    Cette échappée sauvage qui parait sortir de nulle part et n'ayant ni but précis ni point de destination, excepté peut être celui fixé par l'imaginaire de leurs concepteurs et de ceux qui lèvent les yeux vers ces apparitions inattendues, court depuis plus d'un siècle dans les cieux parisiens... Quel panorama s'offre ainsi l’Harmonie et l'Immortalité ... si ces équipages ne semblent pas avoir d'adresse à rejoindre, ils filent vers un monde aussi imaginaire que surréaliste empreint de poésie et de rêve...

  • Paris à cheval : Place des Vosges un hommage discret pour un roi effacé

    Le 08/05/2011 à 20:11Paris à chevalCommentaires (0)Ajouter un commentaire

    Au coeur de la Place des Vosges, dans cette cour royale feutrée presque intime aux volets intérieurs souvent fermés.... là où les pieds foulent le sable fin et la verdure des gazons, dans cet écrin où le XVIIème siècle français s'offre dans une simplicité majestueuse, se cache sous les feuillage des marronniers, une statue équestre de Louis XIII. 

    C'est donc dans ce lieu historique de la place des Vosges qu'on a représenté, presque discrètement je dirais, la statue du roi français, posée sur le piédestal que l'on doit aux monarques et aux grands, celui d'une monture : un cheval. 

    La place Royale que l'on a nommé place des Vosges en 1800, du nom du département des Vosges qui fut le premier à s'affranchir de l'impôt sous la Révolution française, est la quasi réplique de la place ducale de Charleville-Mezière. Sa construction débute en 1605 et s'achève en 1612 à l'occasion des fiançailles de Louis XIII avec Anne d'Autriche. Conçue sur un plan carré de 108 mètres, elle offre au regard une grande unité de présentation : composée de 36 pavillons (9 de chaque côté de la place), la hauteur des façades étant égale à leur largeur.

    Bordée d'immeubles d'habitation de deux étages réalisés en briques rouges à chaînages de pierre calcaire blanche, à toits d'ardoises bleues très pentus et aux fenêtres à petits carreaux, elle présente également la particularité d'être constituée au rez de chaussée d'arcades qui sont à la fois un lieu de promenade et un espace marchand. Qui dit place royale, dit statue royale évidemment, et y placer Louis XIII me semble cohérent, ce qui suit l'expliquant brièvement. 

    Cette statue équestre du roi a été réalisée et installée dès 1639, c'est à dire du vivant du monarque. Mais comme les autres, elle fut détruite pendant la Révolution sous la force de la vindicte populaire désireuse d’éradiquer tout symbole et toute référence renvoyant à l'ancien régime, mais aussi par nécessité : tout ce qui pouvait être fondu en canon ou artillerie était sacrifié. Sous la Restauration et comme la plupart des autres sculptures royales elle est réinstallée. Oeuvre de Jean-Pierre Cortot d'après un modèle de Charles Dugaty (de 1816), elle est érigée en 1829. Entièrement faite de marbre blanc, son piédestal est entouré d'un grillage de fer forgé, comme la plupart des autres modèles parisiens. Un tronc d'arbre soutient le cheval, évitant ainsi un affaissement général (et une pose beaucoup moins glorieuse pour son cavalier....).

    Le cheval semble tranquille, presque au pas, l'action n'est pas de mise ici, on est plus dans l'apparat, la glorification du monarque qui ne se présente pas dans la tenue de combat de son temps, mais presque en petite tenue, comme un empereur romain. Il ouvre le bras droit dans un geste de majesté en se tournant vers la gauche, souriant. Il monte sans étriers. On a choisi ici de souligner la supériorité du statut du roi, en l'habillant comme un empereur, c'est la un acte de représentation et non pas un manifeste. Ce n'est pas un homme investi, courageux, guerrier, vindicatif et grandiloquent qui est posé là...pas d'armure, pas d'étrier, pas d'éperon, pas de chapeau ou de casque, un cheval au pas...plutôt pépère le roi....

    Seule la fine moustache et la chevelure rappelle bien qu'il s'agit d'un homme du XVIIème siècle. On ne sent pas d'envolée lyrique, glorieuse et prestigieuse dans cette statue, la tête du cheval penchée modestement en avant en témoigne presque....pas de sceptre ni de bâton....que cette main ouverte mais qui ne semble même pas montrer un chemin, donner un signe, ou un message. Ces deux éléments me semblent traduire presque une certaine platitude.

    Un hommage discret et anonyme (correspondant bien à cet emplacement, un peu en retrait, voire caché dans Paris) pour celui qui, malgré ses nombreuses réalisations, restera toujours un monarque dans l'ombre de quelqu'un....sa mère la régente, mais aussi Richelieu, puis ses favoris et quelque part également, un peu lui même....Personnage fragile à l’ambiguïté affichée, il est un roi effacé manquant de personnalité. Cette statue et cet emplacement me semblent ainsi adaptés à ce personnage de l'Histoire de France.

  • Paris à cheval : Marcus Curtius cherche admirateurs...

    Le 01/05/2011 à 20:17Paris à chevalCommentaires (0)Ajouter un commentaire

    En redescendant de la place des Victoires et en retournant aux abords de la Seine, on est souvent bien tenté de passer par la rue de Rivoli et le Louvre. Après avoir longé les arcades aux allures de marchands du temple pour touristes et traversé la rue, la Cour Napoléon s'ouvre à vous et vous invite à une pause au pied de la pyramide de verre où viennent se refléter les jets d'eaux, les façades et les toits des pavillons de Sully et de Richelieu mais aussi le ciel parisien...

    Presqu'au pied de l'oeuvre de Peï, à quelques mètres à peine, se dresse sur son cheval le roi soleil (himself), que l'on oublie presque dans cette cour où il n'y en a que pour le verre, l'eau des fontaines, l'arc du Caroussel et cette mythique perspective qui porte le regard du promeneur jusqu'au confins de la Défense....Oui c'est vrai, on ne le voit pas ce roi pourtant représenté dans toute sa splendeur et à la vue de tous...on l'ignore presque tout concentré que nous sommes à regarder les façades sculptées, et chercher l'entrée du musée...alors voici quelques mots pour remettre sur son piédestal cette statue équestre qui a, elle aussi, une histoire bien particulière.
     
    Commandée par Louis XIV en 1665 au Bernin (le "nouveau Michel ange"), elle apporte une grande déception à son commanditaire lorsqu'on la lui livre à l’orangerie de Versailles 20 ans plus tard en 1685, alors qu'il avait atteint la quarantaine. Ce marbre de 8 m de haut ne satisfait pas le roi soleil qui, l'estimant mal faite, promet de la briser. Se ravisant, il demande au sculpteur Girardon de la modifier, celui ci lui ajoute simplement un casque sur la tête et remplace le rocher servant de socle au cheval par un buisson de flammes. Ce nouveau personnage est nommé "Marcus Curtius" en hommage au héros romain qui se voua aux dieux infernaux pour sa patrie....La statue ainsi corrigée est néanmoins "exilée" près de la pièce d'eau des suisses dans le parc de Versailles, loin des autres sculptures qui ont trouvé grâce aux yeux de la cour...C'est cet isolement qui la sauve pourtant de la vindicte populaire lors du tumulte de la révolution française, lui permettant ainsi de subsister aux assauts revanchards.... et d’atterrir finalement en 2005 à l'orangerie du château. L'exemplaire de la Cour Napoléon dont je parle ce soir n'est qu'une réplique de plomb, fondue en 1988 et placée là pour renforcer peut-être l'identité de ce lieu que certains ont estimé dénaturé par l'érection de la pyramide.
    Si cette statue a tant déplu au roi, c'est qu'entre le moment de la commande et la livraison de la sculpture, 20 ans se sont écoulés et que la mode à Versailles n'est plus à l'extravagance et au fantasque mais bien au classicisme. Il faut bien dire que ce Marcus Curtius est une excellente définition du style baroque italien dont le Bernin s'était fait l'ambassadeur à la cour du roi de France. Il suffit en effet de souligner les contorsions axquelles le cheval comme son cavalier sont soumis (des mouvements totalement contre nature), les envolées lyriques de la crinière et de la queue de l'animal, de la chevelure du roi, du drapé foisonnant pour comprendre que nous somme bien dans le style fluide et orné caractéristique du baroque italien... Une originalité stylistique qui n'est effectivement plus de mise en cette fin du XVIIème siècle où la ligne droite et la sobriété élégante sont recherchées à Versailles. 
    Tout en effet dans cette oeuvre rappelle le baroque italien pour lequel Louis XIV avait fait les yeux doux quelques années plus tôt. Ce cheval à l'expression qui n'est presque plus animalière mais humaine, semble sorti tout droit des écuries du baroque italien, où le maniérisme est encore un peu exacerbé...
    Mais plus concrètement encore, cette statue aujourd'hui est autant ignorée et délaissée qu'à l'époque de sa réalisation, décidément elle ne semble pas beaucoup émouvoir ses spectateurs, hier reléguée dans un bosquet éloigné, aujourd'hui si elle est au milieu d'une cour ultra fréquentée elle n'en reste pas moins ignorée. Elle n'attire pas particulièrement les photographes qui préfèrent de loin la vue sur le jardin des tuileries ou sur les reflets du ciel parisien apparaissant sur les facettes de verre de la pyramide. Plus prosaïquement, elle est surtout un point de ralliement pour les pigeons qui squattent entre les pattes du cheval et s'amusent à batifoler sur les plumes qui coiffent le roi....elle offre aussi au sol une assise aux touristes fatigués ;  elle est enfin un lieu d'expression de choix pour les amoureux qui laissent la trace d'un amour fugace ou durable (selon) sur le socle de pierre qui lui est pour le coup est réellement honoré...

  • Paris à cheval : le Roi Soleil au faite des victoires

    Le 24/04/2011 à 20:01Paris à chevalCommentaires (0)Ajouter un commentaire

    Nous revenons sur nos pas et quittons les bords de Seine pour passer dans le second arrondissement, non loin de la galerie Vivienne et de la galerie Colbert, pour monter jusqu'à la Place des Victoires...on doit d'ailleurs ce nom à la première statue du monarque dont je vais parler d'ici quelques lignes...il convient de préciser que l'aménagement de cette place, datant des années 1680 a été réalisé pour la mise en valeur d'une statue équestre à l'effigie du roi en hommage aux victoires françaises réalisées sous le règne du roi soleil...

     

    La statue que nous connaissons est le troisième ornement offert à cette petite place qui sépare le premier du second arrondissement. En effet, de 1686 à 1792 Louis XIV avait déjà ses marques sur le terre plein circulaire. Une sculpture de Martin Desjardin avait était réalisée en pied, sur un socle de bronze important représentant quatre esclaves représentant les nations vaincues par le roi (l'Espagne, l'Empire, le Brandebourg et la Hollande), également des allégories des sentiments ressentis dans l'épreuve de la captivité : l'abattement, la colère, la résignation et l'espérance), ainsi que des médaillons et des inscriptions en l'honneur du roi (des parties de ce socle sont aujourd'hui conservé au Louvre). Quatre fanaux y brûlaient en permanence. Le groupe sculpté d'une hauteur de 12 mètres devait pouvoir être vu dans un angle de 18° à partir du périmètre de la place. Ces sculptures monumentales correspondaient en tout point au principe classique selon lequel les oeuvres colossales doivent être parfaitement finies de façon à pouvoir être vues aussi bien de près que de loin.
    En 1792, chute de l'ancien régime oblige, le monarque disparaît pour faire place à une pyramide de bois où sont inscrits les noms des citoyens morts durant la nuit du 10 août 1792, le bronze est fondu et le roi va se rhabiller....L'Empire remet les choses dans l'ordre et choisit de mettre les grands hommes à l'honneur....la pyramide finit en bois de chauffage (enfin c'est la légende qui le dit) et c'est le Général Desaix qui devient alors locataire de la place des Victoires. Mais le malheureux est en tenue d'Adam, la nudité choque et l'ouvrage est alors assez rapidement retiré du regard des parisiens, la statue est fondue avec deux autres pour réaliser l'effigie d'Henri IV dont je parlais il y a peu. Louis XVIII demande alors au sculpteur Bosio en 1828 une nouvelle réalisation à l'effigie de Louis XIV pour combler le vide laissé sur la place. Elle est inauguré le 25 aout 1828, jour de la Saint Louis. L'ensemble est classé monument historique en 1992.
    Le roi soleil est représenté tel un empereur romain sur un cheval cambré dont l'équilibre est assuré par la queue de l'animal fixée au piédestal, dans un style baroque qui reflète le style en place durant le règne du monarque. Le socle en pierre est orné d’inscriptions latines et de deux bas reliefs de bronze, l'un représentant la passage du Rhin par les troupes françaises, l'autre l'institution, de l’ordre royal et militaire de St Louis par Louis XIV. 
    De facture presque grossière, l'ensemble n'a pas grand chose de royal et le ressenti n'est pas vraiment là, seul l'expression du cheval peut peut être laisser le spectateur un peu songeur, encore que....La statue mettant en scène le roi tel un empereur romain, une tenue qu'on lui connaissait déjà à l'époque, au XVIIème siècle empreint de classicisme, tout renvoie à l'antiquité, l'armure romaine, les sandales, la couronne de lauriers des vainqueurs. Pourtant sous cet affublement, on reconnait le roi soleil avec sa perruque bouclée et sa fine moustache. Son sceptre dans la main droite, indique bien le pouvoir.
    Tout de même, de loin, la statue semble être comme la cerise du gâteau que serait la Place des Victoires pour d'ailleurs quelles victoires aujourd'hui ? A l'heure actuelle ce nom n'évoque plus du tout la raison pour laquelle on le lui a donné...en effet, la sculpture originale qui avait donné ce nom à l'emplacement sur lequel elle était située n'existe plus...et rien dans l'épreuve réalisée à la restauration n'indique des victoires particulière hormis le regard conquérant du protagoniste et son accoutrement de vainqueur.... Mais en connaissant l'histoire de cette place et des précédentes statues, l'édifice actuel laisse le promeneur un peu tiède : on regrette vraiment l'original du XVIIème siècle....

     

  • Paris à cheval : les "boîtes noires" d'Henri IV

    Le 17/04/2011 à 20:39Paris à chevalCommentaires (2)Ajouter un commentaire

    Nous quittons la place des Pyramides et sa locataire toute d'or vêtue pour remonter la rue de Rivoli, à l'est, en direction de la Seine. Arrivés au Pont Neuf (dont je reparlerai prochainement), on trouve en le traversant, à mi chemin sur un terre plein à la pointe occidentale de l'Ile de la Cité, une grande statue équestre représentant Henri IV. C'est en effet du béarnais à qui l'ont doit le notable mais non moins intéressé "Paris vaut bien une messe" dont il sera question ce soir dans ce second billet dédié aux statues équestres parisiennes. Surplombant le petit square du vert Galant, il règne ainsi sur ce coeur de Paris, ceint par les deux bras de la Seine.

    Cette statue a une histoire particulière.... presque mouvementée, ponctuée d’anecdotes. Érigée une première fois à la mort du roi, en 1614, en hommage à celui qui établit l'Edit de Nantes (pacifiant ainsi le royaume après les sanglantes querelles de religion) et qui laissa la traditionnelle poule au pot (encore en vigueur dans certains foyers d'ailleurs...). Nous devons cette première épreuve en bronze aux sculpteurs Giambologna et Pietro Tacca. Il est à noter que c'était à l'époque la première statue équestre, indépendante de toute construction, s'offrant ainsi au public, devenant alors une attraction à part entière. Malheureusement, comme la plupart des autres statues, elle est fondue pendant la Révolution. 
    Mais la Restauration va reprendre sa revanche sur les bonnets phrygiens...c'est ainsi qu'en 1818, Louis XVIII commande à François Frédéric Lémot une seconde version à l'image de la première. L'ouvrage est inauguré en grande pompe, le 25 août, fête de la St Louis, prénom de nombreux rois de France, dont Louis XVIII. 
    Tout dans cette statue équestre reflète d'une part le sens de l'hommage rendu à un monarque mais aussi l'esprit de la Restauration. Rappelons à ce titre que la statue équestre symbolique de la féodalité et de l’aristocratie guerrière, évoque la sacralité du pouvoir et la servitude des suzerains. Un hommage artistique également car outre les emblèmes et les symboles qui accentue la nature même de l'objet, il s'agit d'un exercice de virtuosité pour l'artiste.
    La statue est posée sur un piédestal de pierre dont les quatre faces sont ornées, pour celles orientées à l'Est et à l'Ouest d'inscriptions latines en lettres d'or, pour les deux autres de bas reliefs de bronze mettant en valeur deux scènes de la vie du roi, au Nord Henri IV à cheval acclamé par ses sujets, au Sud, le roi faisant rentrer des vivres dans Paris assiégé. L'homme est en armure, symbole de guerre mais aussi de puissance, de pouvoir, de courage aussi. Il est couronné de lauriers une référence aux lauriers de la victoire et de la réussite. Aux lauriers ont été ajoutés le sceptre fleur de lysés rappelant directement l'ancien régime et le royaume de France. Comme souligné précédemment, la statue équestre évoque un hommage rendu à un homme important, que l'on surélève de terre pour mieux la voir certes, mais pour mettre également une distance et indiquer une supériorité supplémentaire vis à vis des simples spectateurs, sujets, suzerains, valets, servants. Alors que la statue de Jeanne d'Arc présente des caractéristiques visant à protéger la belle héroïne, courageuse mais femme au demeurant, ici plusieurs éléments marque le statut (avec un t...) ainsi que le caractère sacré et supérieur propre à un monarque de droit divin. 
    Ainsi, à un premier niveau on observe que l'emplacement en lui même est déjà une marque de distance....le choix de placer cette statue sur l'Ile de la Cité, entre les deux bras de la Seine ne me semble pas anodin, comme un écrin presque une barrière naturelle. Le second niveau pourrait être cet enclos dans lequel loge l'édifice, une barrière en fer forgée noire ceint la statue dans un périmètre de quelques mètres. Un moyen simple et efficace d'éloigner les trop curieux et les mal intentionnés mais aussi de placer le citoyen et le simple passant à distance. Le piédestal éloigne encore le roi de ses sujets, que vient encore amplifier la distance offerte par l'assise du cheval. Les bas reliefs et les inscriptions ajoutent enfin à la grandeur de l'homme tout comme les attributs précédemment évoqués de l'armure, des éperons, du sceptre et des lauriers qui viennent renforcer encore un peu plus le caractère spécifique du statut de l'homme représenté. Monarque, choisit par Dieu, il devient par là presque inatteignable, intouchable...
    C'est avec du bronze récupéré de la statue de Général Desaix de la Place des Victoire (dont je reparlerais bientôt), la statue de Napoléon de la colonne Vendôme et d'une troisième colonne, qu'est réalisée cette sculpture d'Henri IV, d'après d'anciennes gravures représentant l'originale. Ont dit que Lémot aurait été bonapartiste et que par dépit ou par attachement personnel à l'Empereur il aurait caché dans la fonte une statuette de Napoléon Ier. Une récente restauration en 2004 a permis de découvrir que l’empereur n'était pas le seul locataire dans le ventre du cheval.... (non je ne vais pas parler de vers solitaire, le profil du billet tendrait vite à perdre de son sens et de sa tenue...), puisque 7 boites en plomb ont été découvertes : 4 déjà répertoriées ont révélé des ouvrages dont un relate le récit de transport et de la mise en place de la statue, de la fonderie du Roule au Pont Neuf, mais aussi des médailles à l'effigie des grandes figures de l'Ancien Régime. Une façon de contrecarrer les effets de la statuette de Napoléon et préserver la Restauration de toute tentative de putsch ? Ceci n'est qu'une hypothèse qui n'engage que son auteur...il est à noter que les deux dernières boites ont révélé des parchemins roulés ne pouvant être déplié.
    Ainsi, c'est de la pointe de l'Ile de la Cité, sur le Pont Neuf, chantier important d'urbanisation de son règne et dont il est le principal maître d'oeuvre, que le premier des Bourbons règne désormais sur Paris.

  • Paris à cheval : Un hommage à l'or fin pour la pucelle...

    Le 10/04/2011 à 21:16Paris à chevalCommentaires (0)Ajouter un commentaire

    On peut visiter Paris de mille et une façon, à pieds bien sûr (et c'est sans doute la meilleure façon de faire), à vélo, à bateau, à roller, en métro ou encore en bus (si, si...), mais aussi à cheval...Non, je ne parlerais pas ici de sorties avec la Garde Républicaine qu'il m'est arrivé de croiser quelques fois, mais d'une petite visite de la capitale, grâce aux statues équestres qui ornent, meublent et agrémentent certains coins de Paris, tout en évoquant un petit chapitre de notre histoire... Alors voici une série de plusieurs billets sur le sujet me permettant de relater quelques faits, au son des fers à cheval frappant le pavé et du rythme cadencé du pas ou du trot.

    Pour commencer, et bien commençons par le commencement.... c'est à dire le premier arrondissement, avec une grande dame de l'Histoire de France, mais qui était en fait une jeune demoiselle d'à peine 20 ans... Sur la petite place des Pyramides, non loin des bureaux de la Direction des Musées de France, des arcades de la rue de Rivoli qui voient passer tant de touristes affamés de "friandises" et autres clichés parisiens qui leur sont directement réservés ; face au jardin des Tuileries et un peu plus loin face à la Seine, se tient droite, le regard fixe vers son objectif à atteindre, la Pucelle d'Orléans, assise sur son cheval, en tenue d'apparat. Oui, car il s'agit bien de Jeanne d'Arc, représentée ici en guerrière sur son cheval de combat, dont il va être question dans ce premier artucle. 

    Le projet d'ériger une statue en hommage à la jeune femme date de l'aube de la troisième République. Est tout d'abord proposé un modèle réalisé par Armand le Véel, élève du grand sculpteur Rude, mais c'est finalement la suggestion d'Emmanuel Frémiet qui est retenue. Ce sont les frères Thiébault qui en réalisent la fonte en 1872, avant de l'inaugurer sur la petite place des Pyramides en 1874. Toutefois, le maître d'oeuvre n'étant pas satisfait du résultat, il en fera faire une seconde épreuve en 1899 qui remplacera la première, c'est celle que nous connaissons aujourd'hui.

    Posée sur son socle, premier niveau de protection, la statue est totalement dorée....sous le soleil et même sous un ciel gris, elle brille de mille feux et détonne dans son environnement urbain fait de pierre, d'ardoises et de grisaille. Comme un anachronisme, elle reste stoïque et imperturbable dans son armure, surplombant l'agiation du coeur de Paris entre les scooters, les taxis, les rollers et les cars de touristes. Non statique, le mouvement du cheval et le tissu plissé du drapeau témoignent d'une figure en action, permettant ainsi un réalisme important et renforçant l'impression qui se dégage de cette sculpture.

    Comme d'autres statues équestres, une symbolique est conférée à la représentation du personnage, image de la conquête, du courage, de la vaillance, du combat, de la victoire aussi... La représentation d'une statue équestre étant réservée aux grands hommes, aux monarques comme aux grands guerriers, c'est donc une reconnaissance très importante que l'on a rendue à la fillette de Domrémy... une jeune fille aux origines simples que l'on n'a pas toujours cru mais qui, par son courage et sa foi, a fait chanceler les grands de son temps, qu'ils soient monarques, militaires ou hommes de Dieu.

    Il semble se dégager de cette représentation, une force tranquille, la force de ceux qui se savent guidés et qui sont en confiance, une assurance, de la ténacité, de la persévérance dans une destinée que l'on a pas choisi mais que l'on sait être la bonne. Le regard fixe, la tête droite et le menton relevé, il y a dans cette sculpture de la détermination. Le cheval, plus qu'un moyen de locomotion sur un champ de bataille ou entre deux points, est ici un symbole de puissance, mais aussi véritable bouclier vivant. C'est un second niveau de protection pour notre héroïne. La jeune femme est en armure, sa tenue de combat, la tête découverte pour laisser deviner son identité, elle brandit l'étendard français. Cet habit de fer, c'est une protection supplémentaire, un troisième niveau de protection....

    Nul doute que la jeune femme de par son courage et sa conviction avait droit à une place de choix et un hommage particulier dans la capitale. Des honneurs symbolisés par cette dorure lui conférant un caractère singulier, voire exceptionnel, qu'il faut probablement rapprocher directement du personnage en question (voir la suite du billet). En effet, il fallait distinguer cette personnalité de l'histoire de France du reste des grands hommes de la nation : une femme, que dis-je une jeune fille... une guerrière au destin tragique où se mêle étroitement la notion de foi. On ne pouvait donner à ce symbole de l'histoire de France n'importe quelle marque d'estime et de respect. Il me semble que cette statue totalement dorée est un hommage lourd de symbolique : La dorure conférant à cette oeuvre un caractère spécial touchant presque au sacré : réservée aux plus grands, que ce soient aux monarques ou aux figures importantes de la religion. Ici il me semble qu'elle intime un respect supplémentaire parce que justement Jeanne d'Arc n'était pas de ceux là.... Cet habit de lumière si précieux indique la puissance guerrière, la victoire, mais pas seulement, elle symbolise également la grandeur de l'âme, de la personne dans sa totalité, et qui plus est surtout ici son intégrité, la rendant ainsi presque intouchable. Plus qu'un hommage, cette dorure m’apparaît comme une protection supplémentaire à l'armure, celle d'une protection symbolique, quasi spirituelle, la protection des élus....C'est le quatrième niveau de protection, le plus subtil mais aussi le plus fort.... 

    En ces temps où les notions de religion et de laïcité sont particulièrement évoquées, il est à souligner, je crois, que lorsque cette statue a été commandée et érigée, Jeanne d'Arc n'était pas encore canonisée. Il ne s'agit donc pas d'un hommage à caractère religieux mais bien républicain.... Oublions également quelques instants que cette statue marque aussi le point de départ d'un certain défilé au mois de mai, et ne voyons qu'en cette sculpture, une oeuvre d'art dorée à l'or fin de la reconnaissance et du souvenir respectueux de la nation envers une figure emblématique de son histoire nationale. 

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